La route de Versailles à Saint-Germain est une des œuvres d'Alfred Sisley (1839-1899) les plus foisonnantes et les plus délicieuses. Réalisée en 1875, cette huile sur toile magnifie la lumière dorée d'une belle journée d'été. La route, dont on ne voit qu'un virage entre les arbres majestueux draine le regard vers la calèche surmontée d'une ombrelle. Un ciel, ourlé de gros cumulus de beau temps surplombe un petit village, suggéré au fond, et, sur la droite, un vignoble contemplé par un personnage qui en arpente la lisière. Au premier plan, dans le frémissement des herbes et des buissons, une jeune femme est assise auprès de son panier.
Les traits de couleur brillante du tableau et les coups de pinceau vifs et enlevés sont d'une facture résolument impressionniste, où plane encore l'esprit d'un Corot ou d'un Constable. Les personnages ne sont que suggérés par des touches très habiles qui en révèlent les attitudes pour qui contemple la toile à distance.
La composition du tableau est minutieuse, avec, sur la droite, un quart de sa surface pour le ciel et pour la petite butte herbeuse, et un horizon placé bien au centre. Le spectateur contemple donc la scène debout, sur un léger promontoire qui place son regard à la hauteur du village, en arrière-plan. Sur la gauche, le feuillage des grands arbres occupe presque toute la place, et les troncs où se jouent ombres et lumière dégagent le virage emprunté par la calèche. Une diagonale qui relie l'amorce de la route avec la base du vignoble, dirige les yeux vers le personnage de droite, assis dans le pré.
Un an plus tôt, Alfred Sisley réalisait déjà sur ce thème "La route de Saint-Germain". Même direction de virage, même calèche et même suggestion de personnages pour ce tableau présenté, avec 5 autres toiles, à la première exposition impressionniste d'avril 1874. Le critique Jules-Antoine Castagnary l'a commenté en ces termes: " Monsieur Sisley a de la distinction, et il la porte jusqu'à la grâce dans un paysage vraiment poétique..." et Catulle Mendès trouve l'œuvre "charmante".
Dans ses conférences d'histoire de l'art, Fabrice Roy conjugue le passé au présent, dans une évocation poétique et ludique du 19ème siècle français...
